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Interview : ALLAND BYALLO


Alland Byallo est un Dj-Producteur de musique électronique, naviguant entre tech-house et minimal. Venant tout droit de San Francisco, où il est un acteur de la très active scène électro locale, Alland est passionné de musique depuis toujours, il a accepté de répondre à quelques questions...

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WAS : Pour commencer, peux-tu te présenter ?
Alland Byallo : Je suis Alland Byallo, je fais 1m77, et j'ai récemment déménagé de San Francisco à Berlin, dans le quartier de Kreuzberg, dans une magnifique rue qui doit son nom aux frères Grimm, tout du moins c'est ce que l'on m'a dit.
J'ai 31 ans au moment de l'interrogatoire.
Je suis obsédé par la musique, l'art, les bons films, les navets, les voyages, cuisiner, manger, rencontrer des gens, présenter des gens, Jameson, Bukowski et les chiens.
Je suis un dj aussi bien de club qu'underground, producteur de musique électronique, graphiste - plutôt axé peinture -, et partenaire de danse lors de deux évènements musicaux à San Francisco.
Je prévois de continuer à jouer un petit moment chaque année.
Je serai de retour en avril pour jouer à [KONTROL] avec Steve Bug, et rebelote en juin pour fêter nos 6 ans.



WAS : Alland Byallo est ton vrai nom je suppose, tu n'as pas peur de te faire traquer par des centaines de fans ? 
A.B : C'est en effet mon vrai nom. Il est assez étrange. Généralement, les gens se trompent en l'écrivant, d'ailleurs la dernière ré-interprétation en date est "Adam". Ma favorite reste quand même Almond.
Les fans ? il fait trop froid à Berlin pour les fans. D'ailleurs, de quoi se réchauffer serait bienvenu ! J'ai sans succès tenté de m'attacher à nommer ce que je produis jusqu'à maintenant. Mais je vais bientôt sortir "The New Elastics" sur un des labels "Coyu's My Cup Of Tea". C'est un son hybride rock/disco/électro, assez amusant. Mais, en général, quelque chose m'empêchera d'y coller le nom que je veux.
J'en ai un autre que je veux utiliser pour de la prod plus sombre, plus noire. Mais ce ne serait pas drôle si ce n'était pas un secret. Chuuuut… 
 

WAS :  J'ai lu dans ta biographie que tu pratiques le DJing et tu produis de la musique électronique depuis 10 ans, comment t'es-tu retrouvé dans cette voie ?
A.B :Je pense qu'une réponse clichée serait la plus adaptée. Quelqu'un devrait rassembler toutes ces réponses et en faire un pamphlet !
Ça va faire 11 ou 12 ans maintenant, je pense. J'ai commencé avec des programmes comme Audiomulch, Acid et CoolEdit, à créer des sons de ci, de là. Mais je n'étais pas encore sur la house ou la techno, c'était plutôt drum & bass, et même des trucs bizarres hip hop instrumental basé sur des samples.  Je collectionnais beaucoup de musique, la plupart du temps des CDs assez rare, ce qui m'a fait dépenser pas mal d'argent dans l'importation par des compagnies japonaises.
Je connaissais quelques DJs et je me suis retrouvé dans pas mal de rave-party et d'autres évènements underground dans le même style. Il y avait vraiment un esprit musical assez "sauvage" à l'époque. J’étais assez inspiré par la musique que j'écoutais et j'ai appris beaucoup sur la house et sur la techno, vu que j'écoutais ça non-stop depuis 1989.
Je pense que je suis devenu obsédé par ce style en 92 ou 93. Mon ami Alfredo ramenait des mixtapes à l'école, et j'enregistrais le "Power Tools Radio show", je virais la musique sur mon super magnéto. On échangeait de cassettes audio tout le temps. A la longue, j'ai finit par prendre des leçons par mon ami Matt Matulevicius. Quelques semaines plus tards, j'ai décidé de dépenser tout mon salaire pour m'offrir ma première table de mix, et c'était lancé.
Au début, je jouais beaucoup de musique techno des labels comme Drumcode, Tresor, Skunkworks, SLS, Primate, Purposemaker, Cytrax, Force inc., et Pounding Grooves. Mais j'ai bientôt découvert que ce qui me plaisait le plus était la minimal house, la teck house et d'autres sons houses plutôt funky et soulful. De mémoire, j'ai quitté aux alentours de 2007 mon boulot pour me consacrer pleinement à ma profession. J'ai une mémoire pas terrible, mais je pense que c'est plutôt ça.






WAS : J'ai aussi lu que tu as commencé le piano à l'âge de 5 ans et la trompette à 11 ans. Est-ce que ça t'as aidé par la suite, pendant ta carrière musicale ?
A.B : Tu sais, j'ai toujours dit que je jouais de ces instruments, jusqu'à l'inclure dans ma biographie, mais que ça ne représentait pas ma musique. Je veux dire, c'est sûr, je suis plutôt à l'aise quand il s'agit de gérer les cordes, les mélodies, les harmonies et d'autres trucs dans ce style, mais pour autant, j'ai toujours créé des tracks. La plupart était assez complexe pour que je me sente content, mais dernièrement ça me fatigue. Pas lassé, mais juste fatigué. J'adore faire des cuts tech-house, classic, propre, mais ces derniers temps, je veux m'exprimer plus.
J'ai donc bossé sur des sons plus musicaux et plus artistiques.
J'ai donc travaillé sur des mélodies plus complexes, enregistré et créé mes propres sons, beaucoup chanté. Du coup, j'ai créé beaucoup de trucs qui sonnent très "four to the flour" dans leur structure, mais seront peut-être moins dansants, moins entraînants. Ça m'a permis d'être plus expressif, de vraiment lâcher la bête, vraiment. J'ai fait un break, et j'investis beaucoup d'énergie dans ce nouveau projet, tout en voyant où il me mène. Parfois, j'ai l'impression que tout se fait tout seul, comme si c'était quelque chose de vivant, même si pour l'instant il n'en est encore qu'au stade de l'enfance.


 



WAS : Quel est le genre musical dont tu te sens le plus proche et quels artistes t'inspirent ?
A.B : Je pense que le plus simple est la tech-house. On peut dire que c'est de la house avec une palette et une vie plutôt techno. On peut aussi dire que je fais de la techno avec une vie et une palette house. Ce nouveau matos, pour autant, propose plus de variété. Quelques chansons ont un tempo plus prononcé, plus blues, alors que d'autres sont plus lentes, lancinantes, sexy. D'autres sont carrément épiques, qui partent en trip techno droney, shoegazer. Tout vient de façon étrange, mais ça reste quand même beau. Mais le définir reste un défi, je laisse ça aux journalistes.
Beaucoup d'artistes m'inspirent : Thelonious Monk et Arthur Russel sont mes deux muses du moment, que ce soit d'un point de vue créatif ou de l'âme. Mais au niveau des artistes de dance contemporains, je dirais que Koze m'influence le plus. Les sons qu'il produit, les histoires qu'il raconte avec sa musique…. C'est vraiment quelque chose en rapport avec son univers : c'est comme s'il avait placé une cale géante au milieu de tout ce qui est musique dance, et construit une maison dessus.
D'autres artistes sinon, qui font des étincelles dans ma tête en ce moment sont : Wareika, Aera et Goldwill, Bruno Pronsato, dOP, Jin Choi, Caribou, Matt Dear, The Revenge, The Mole… et je peux continuer longtemps comme ça, mais je pense tout de même que ceux-ci sont les plus notables à l'heure actuelle. 


WAS : Tu te souviens de ta première date ?
A.B : Devant un public ? Mes premiers concerts étaient au café en bas de chez moi, à Newhall en Californie. Quelques amis et moi-même organisions des soirées intitulées "Communication". Je jouais de la deep house et on invitait des gens avec leurs instruments pour jouer par-dessus, ça a été génial pendant un certain temps.
Le premier évènement que j'ai organisé était au "Wonder Bar" à Culver City, une expérience très enrichissante : c'était l'un des seuls endroits où on pouvait écouter de la minimale à Los Angeles, où peu de gens écoutaient ça à l'époque. La plupart des gens appelaient ça comme étant "cette merde allemande bizarre". Ça remonte à 2001 ou 2002… Quelque chose comme ça. Mais on avait déjà des grands talents à l'époque : Kenneth Graham, Jasper (qui tourne maintenant avec Silent Servant), Dean Decosta, Robin Porter, Maetrik, Rithma, Cle Acklin et beaucoup d'autres. C'était cool !

 

WAS : Tu as voyagé à travers le monde, joué un peu partout, quel a été ton meilleur souvenir musical ?
A.B : C'est assez tendu comme réponse à fournir : chaque concert est spécial. J'ai le meilleur boulot du monde ! Il y a certains endroits qui correspondent bien à ta question tout simplement parce qu'il s'agit de lieux de renom, et d'autres qui ne collent pas trop mais qui me restent à l'esprit tout simplement parce que l'équipe était à la hauteur rien que par son accueil.
Mais tout bien réfléchi, chaque concert, chaque foule a une place dans mon cœur et dans ma mémoire. Honnêtement, la meilleure partie, c'est tout simplement voyager dans des endroits où je ne serais tout simplement pas venu visiter par moi même. J'ai beaucoup évolué comme touriste, comme voyageur, le simple fait de pouvoir faire tout ça rajoute encore de la valeur à tout ce que je fais. 


WAS : Peux-tu me parler de [KONTROL] ? 
A.B : Bien sûr que je peux. On fête nos 6 ans en juin, nous avons hébergé une liste sans fin de DJs les plus fameux dans le monde de la techno et de la house. Je travaille avec 4 autres personnes : Greg Bird, Sammy D, Craig Kuna et Nikola Baytala. Greg et Sammy sont venus un jour et m'ont demandé si être résident pour un évènement axé techno me plairait. C'était un petit endroit qui s'appelait Rx Gallery, qu'une équipe appelée Blasthaus gérait. A cette époque, quasiment personne ne proposait de la techno à San Francisco. Il y avait occasionnellement des shows avec Rich, mais globalement c'était pauvrement représenté.
Les malfamés minimal-techo "laptop jacks" de SF était beaucoup moins actif que quelques années auparavant, et on sentait qu'il fallait que quelqu'un devait amener le son aux gens. Ça marchait tellement en Europe, que nous avons fait la même chose.
Nous avons booké : Galoppierende Zuversicht, un duo de Suisse, ainsi que le chef de leur label, Bruchstuecke. Honnêtement, on avait à peine entendu parler d'eux, mais l'opportunité s'est présentée, et ils avaient la réputation d'être parmi les meilleurs en live en Europe. Et bien il faut avouer que c'était un des meilleurs live auquel j'ai jamais assisté, la soirée était énormissime. La file d'attente faisait le tour du quartier, les gens venaient pour le show, pour ce qu'on leur proposait !
Depuis, beaucoup de soirées ont pu s'organiser à San Francisco, ont permis au son d'être mis sur le devant de la scène, et de faire évoluer les choses à partir de ça.
Je pense personnellement que SF est devenu une des plus fortes scènes aux US pour la techno ces 6 dernières années, et nous sommes honorés et fiers d'avoir participé à ça. Nous avons depuis bougé vers un autre endroit, The Endup, qui est ouvert depuis 1973 et est un repère dans le paysage de San Francisco, tout comme dans celui d'Amérique. Mais ce que je préfère, c'est bosser avec mes partenaires. Ce sont des gens géniaux avec qui j'espère continuer de travailler pour le reste de ma vie. 


WAS : Des projets futurs ?
A.B : À côté de ce dont j'ai déjà parlé auparavant en ce qui concerne mes projets musicaux, j'ai des trucs amusants qui vont sortir sur des labels comme Moodmusic, Room With A View, DJ Three's Hallucination Ltd empreint, un autre label : Beef, un EP Shades et mon propre label Nightlight Music. Je suis aussi en train de travailler sur un CD de mixes pour un catalogue pour Tonality, l'excellent label de Jay Tripwire. C'est quand même un sacré honneur pour moi de faire ça !
C'est mon premier mix commercialement disponible, plutôt sympa !
J'ai quelques concerts en Europe bientôt, dans des villes que je n'ai jamais visitées, ça promet. Voir le plus possible de monde est une des plus belles choses que l'on peut faire. Quoi d'autre ? Je suis sûr que j'aurai d'autres idées dès que j'aurai appuyé sur "envoyer".



WAS : Une bonne résolution pour 2011 ? 
A.B : Eh bien, je me remets au Yoga en mars, mais j'aimerais dire que ce n'est pas une résolution. Je ne me sens pas aussi bien que quand je pratiquais plusieurs fois par semaine. J'essaie de ne pas trop faire de résolutions du Nouvel An, vu que je n'arrive pas à les maintenir la plupart du temps. Si je ressens le besoin de prendre des décisions, de changer des choses dans ma vie, je veux le faire sans pressions, surtout de ce genre. Les gens devraient prendre leur temps pour apprendre, aimer et s'améliorer au jour le jour. Mais en général, il y a certaines choses que j'essaie d'améliorer dans ma vie.
J'aimerais proposer des dîners, j'aime bien cuisiner pour les gens, et j'aime essayer toutes les bouteilles que les gens amènent à ces soirées ! Oh, je me suis dit que j'aurai ma première exposition d'art cette année. Je veux vraiment faire quelque chose au service de l'art. Je dois encore m'y mettre et je pense que je rate quelque chose, vu que l'art a été une telle part de ma vie pendant si longtemps. J'ai pas mal de concepts qui traînent dans mon esprit ! J'ai un ami à San Francisco qui possède une galerie, et nous avons parlé brièvement de travailler ensemble cette année. Je fais de mon mieux pour que quelque chose arrive sans non plus forcer les évènements. Une première n'est pas quelque chose pour laquelle il faut se presser. 


WAS :  Rien à ajouter ?
A.B : Eh bien, si ce n'est pas un sous-entendu pour de l'auto-promotion honteusement flagrante, je ne vois pas quoi dire d'autre !
Nous avons sorti le début d'un EP par Dead Seal, intitulé Koo Koo Mind, sur mon label Nightlight Music.
C'est compris avec un super remis par le légendaire Q-Burns Abstract Message. La prochaine sortie consiste en une série de remixes de cet EP par Anthony Mansfield, Dead Seal et moi-même.
L'adresse de notre label est 2nd Fridays au 222 Hyde. Quand je n'y suis pas moi-même, les gens qui le tiennent d'une façon un peu spéciale sont Clint Stewart, Mossmoss et Dead Seal. Ils sont trois des meilleurs DJs house et techno de San Francisco. C'est un vrai honneur de travailler avec eux et de les appeler mes partenaires. Clint et moi discutons quasiment tous les jours, et le soutien que je reçois de lui et des autres est quelque chose de fantastique. Bien sûr, [KONTROL]  est tous les premiers samedis du mois au "The Endup", jusqu'à 6heures du matin ! Un des rares endroits où tu peux légalement faire la fête toute la nuit en Californie, si ce n'est le seul.

Merci pour cette opportunité. C'est un plaisir de discuter avec vous :)

WAS : Merci à toi, ce fut un plaisir !  


(Merci à Thibault pour la traduction)

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